Depuis le 15 novembre dernier, soit à la veille même de l’ouverture de la saison touristique, le ministère français des Affaires étrangères plaçait le centre du Mali en zone orange d’insécurité, donc déconseillé aux touristes tout comme le nord déjà placé en zone rouge. Conséquence de cette politique : les activités touristiques et économiques à Mopti sont aujourd’hui paralysées, l’édition 2011 du festival Diam Yari (DiawWari) est compromise. Face à cette situation, qui interpelle les autorités maliennes, une Française, opératrice touristique à Mopti, accable la politique de Nicolas Sarkozy et souhaite que le Mali porte plainte contre la France et demande réparation du préjudice.
Si en France, le gouvernement déclare aujourd’hui qu’une ville touristique est dangereuse en empêchant les visiteurs de s’y rendre, il doit payer pour compenser les pertes et éviter aux populations de sentir cette situation dans leur activité quotidienne. De la même manière, en lançant une campagne contre le Mali, les autorités maliennes doivent porter plainte contre Nicolas Sarkozy et demander réparation du préjudice. Car aujourd’hui Mopti souffre énormément de l’absence des touristes. Nous ne savons plus à quel saint nous vouer". C’est le cri d’alerte de Dominique Lusardy, promotrice de l’hôtel Doux Rêves à Mopti.
Arrivée à Mopti, il y a 18 ans, à travers l’ONG action Mopti, Dominique Lusardy qui a, aujourd’hui, la double nationalité franco-malienne, a vite épousé la culture malienne à cause de l’hospitalité mopticienne. Depuis dix ans, elle a décidé d’investir dans l’hôtellerie à travers la construction de « Doux Rêves », un hôtel situé à côté du Stade Barema Bocoum dans la Venise malienne. Elle constate avec amertume que tout Mopti souffre aujourd’hui de l’absence des touristes, notamment français qui représentent plus de 90% de la clientèle touristique du Mali.
En effet, le Quai d’Orsay a déconseillé aux Français, sauf motif impérieux, notamment d’ordre professionnel, et après avoir informé l’Ambassade de France à Bamako, de se rendre entre le sud de la zone rouge (délimitée en partie par le fleuve Niger, ndlr) et le nord d’une ligne Kayes-Ségou-Tominian.
Aussi, tous les coopérants français, qui étaient dans la région, ont été contraints de quitter et de se replier sur Bamako. Une source proche de la direction régionale du tourisme de Mopti a révélé que des militaires français ont été aperçus dans la région de Mopti, intimant aux rares Français restés sur place, l’ordre de rentrer.
Le tourisme est l’une des principales activités génératrices de revenus dans la région de Mopti à cause de la diversité des sites. Certains estiment à 9 milliards de FCFA les recettes touristiques annuelles de la région. Tous les opérateurs privés et même publics trouvent leur compte dans cette activité lucrative. Mais on a l’impression aujourd’hui à Mopti que tout est arrêté et que rien n’est fait pour sortir de cette situation. La grande particularité du tourisme au Mali est son monolithisme, c’est-à-dire qu’il est dominé par les Français. Un état de fait que les opérateurs du secteur reprochent au ministre de l’Artisanat et du tourisme qui a trop axé sa politique de promotion sur le marché français. Chaque année, le département de N’Diaye Ba participe aux mêmes salons touristiques en France ignorant les autres grandes nations. Alors que les opérateurs du secteur estiment que l’accent doit être mis sur la diversité de la clientèle notamment vers les pays asiatiques, les Etats-Unis ou l’Angleterre.
"Depuis des années, nous n’avons pas connu une telle morosité de l’activité touristique " ne cesse de répéter Molobaly Coulibaly, chauffeur d’une agence de voyage et de tourisme. La preuve palpable de cette crise touristique est l’incapacité des hôtels et de beaucoup d’autres opérateurs touristiques de Mopti à payer leurs factures d’eau et d’électricité. Il y a deux semaines, beaucoup d’hôtels ont vu leurs compteurs enlevés par EDM-SA. Une coordination régionale des associations de tourisme et de l’hôtellerie a été mise en place pour discuter avec l’agence EDM et convenir des modalités de paiement de ces arriérés. La même coordination, dans une correspondance datée du 22 février 2011, a écri au ministre de l’Economie et des finances pour demander une exonération pour le compte de l’année 2011. Une doléance qui a été soumise au ministre délégué chargé du budget par le Gouverneur de Mopti en marge du Conseil de direction des impôts. De même les opérateurs économiques n’ont pas manqué de le rappeler au ministre Lassine Bouaré venu à leur rencontre.
La Franco-malienne, Dominique Lusardy, qui a refusé de se soumettre aux injonctions de la politique française, se sent bien en sécurité à Mopti. "On a l’impression qu’il y a un règlement politique entre la France et le Mali. En ce 21ème siècle où l’ambition de toutes les politiques est de lutter contre la pauvreté, il est inadmissible qu’on prive toute une région de quoi vivre. Il faut que la vérité soit dite, surtout que la menace n’existe pas. Si la France déconseille le Mali aux touristes, elle doit dédommager les régions touristiques. Comparativement à la même période de l’année dernière, nous sommes à 47% de nos recettes " a-t-elle expliqué.
Youssouf CAMARA
source :
– http://www.maliweb.net/category.php...
Voir à ce sujet :
– http://www.douxreves.com
– Festival Diam Wari de Mopti : http://festivaldiamwari.com/
Voir aussi :
– Le Républicain / Emigration : Menace de sanction de la France contre le Mali ?